Moyen Âge
Agrégation 2020
N° 20, automne 2019
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1 Aspremont. Chanson de geste du XIIe siècle, éd. F. Sua...
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2 A. Corbellari, « Parcours du désir et de la cruauté da...
1Chanson de geste aux enjeux pluriels (chanson de croisade dans laquelle Charlemagne doit réagir à une agression sarrasine en Europe, chanson politique qui, notamment, met en évidence le mécanisme de la largesse en lien avec le pouvoir du souverain et définit clairement les rapports entre l’aristocratie guerrière et le clergé, chanson d’enfances qui relate les premiers exploits de Roland, trace ou annonce de chanson de révolte, avec la figure de Girard), la chanson d’Aspremont1 fait intervenir des personnages nombreux et variés, et l’on serait bien en peine « d’attribuer la palme de l’héroïsme à un personnage précis dans une chanson qui insiste si clairement sur la solidarité et la bonne entente des chevaliers de Charlemagne »2.
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3 Voir les v. 4269-4280, 6799-6808, 6815-6823, 7334-7340...
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4 L’organisation sociale du monde sarrasin paraît toutef...
2 De fait, si, comme la plupart des chansons de geste, Aspremont valorise des personnages puissants sur le plan économique et politique, elle s’attache également, sans doute bien davantage que d’autres chansons, à évoquer assez précisément des phénomènes de promotion sociale, en particulier des promotions de non-nobles, sur le champ de bataille, en raison des circonstances, à la classe chevaleresque3, mais aussi à mettre en relief la diversité des conditions à l’intérieur de la classe chevaleresque, et à évoquer des cas possibles ou effectifs de promotion à l’intérieur de cette classe, dans le souci de décrire une société idéale où toutes les forces vives sont tendues dans le même but et dont le fonctionnement parfait, dépourvu de toute tension réelle (comme le montre exemplairement l’absence, dans les faits, de querelle véritable entre Charlemagne et Girard), permet la victoire contre l’ennemi, tandis que le monde sarrasin est marqué par des dissensions permanentes4.
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5 Voir J. Larmat, « L’orphelin, la veuve et le pauvre da...
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6 À la fin de la chanson, Girart ne dira pas autre chose...
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7 Ains que li roi s’asist desos le pin / Ne qu’il se lie...
3Dans le prologue, qui fait l’éloge de Naimes, il est ainsi question de ces frans linages (v. 24) que Charlemagne, grâce à son excellent conseiller, a fait essaucier et avemcier (v. 24 et 26), ce qui lui a permis, avec le temps, d’avoir .xv. roiaumes […] a justissier (v. 38). Lors de l’épisode initial de la chanson, celui de la cour plénière à Aix, Naimes conseille à Charlemagne d’aimer notamment les povres (v. 59), à savoir les chevaliers pauvres, de rang médiocre5, et précise tout l’intérêt de cette attention particulière : Il se lairoient por vos tuit detrenchier (v. 65)6 ; Naimes se propose même d’ouvrir son propre trésor pour en faire bénéficier le povre chevalier (v. 74). Reconnaissant de cet excellent conseil, l’empereur distribue alors ses richesses (laisses 6 et 7) en les spécialisant selon le rang de celui qui les reçoit : ainsi, les povres soudoiers (v. 136) ne recevront pas la même chose que les proudesomes qui sont de gentil lin (v. 134). S’appuyant sur le texte de ce passage dans l’édition Brandin7, ainsi que sur d’autres textes médiévaux, Ph. Haugeard fournit une analyse éclairante du fonctionnement et des enjeux de la largesse que la chanson d’Aspremont exhibe :
Derrière sa banalité apparente, cette énumération est riche d’enseignements : […] la nature des dons faits aux vassaux dépend de la condition de ces derniers ; s’il y a bien des dons transversaux, comme les faucons offerts aux damoiseaux, aux soldoiers et aux gentils hommes, Charlemagne prend bien garde à différencier ses libéralités, réservant aux uns ce qu’il ne donne pas aux autres, notamment les objets précieux qu’il distribue exclusivement à ses vassaux de haut lignage. Cette façon de faire est conforme à ce que l’on sait de la largesse carolingienne : à l’occasion des cérémonies de donation, la valeur des présents dépendait étroitement du rang social des donataires […] ; si les dons faits aux ‘pauvres chevaliers’ peuvent répondre à leurs besoins économiques (don d’argent) ou à des nécessités liées à leur condition chevaleresque (don de chevaux), il va de soi que les présents offerts aux ‘gentilshommes de haut lignage’ ne peuvent avoir qu’une portée honorifique : ces dons les distinguent et leur valeur (marchande ou symbolique) est clairement proportionnelle à l’importance de leur rang. Au final, la largesse de Charlemagne, pour être collective, n’en est pas moins discriminante : elle signale et renforce les hiérarchies sociales et politiques à l’intérieur d’un groupe faussement homogène.
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8 Ph. Haugeard, Ruses médiévales de la générosité. Donne...
4[Cette] pratique […] répartit finalement les membres de l’aristocratie en deux groupes distincts – les riches hommes d’un côté, les povres hommes de l’autre – pour lesquels la largesse du souverain possède en effet des significations bien différentes : pour les seconds, la largesse du souverain remplit une fonction économique […] ; pour les premiers, elle remplit une fonction sociale et politique : si les présents qui leur sont offerts sont […] les plus précieux et les plus chers […], ce n’est évidemment pas pour répondre à des besoins économiques qu’ils ne connaissent pas, mais pour les honorer ; ces dons signalent leur importance sociale et augmentent leur prestige aux yeux de ceux qui leur sont inférieurs ou inféodés : ils accroissent leur capital symbolique et donc confortent leur place éminente dans la société. Par sa largesse, le souverain entretient et accroît son autorité sur l’ensemble de son aristocratie, mais en même temps, il maintient les hiérarchies internes : c’est toute l’organisation sociale de cette même aristocratie qui est à la fois montrée et confortée – de façon spectaculaire.8
5S’il est tout à fait vrai que cette scène de distribution des richesses met en évidence la répartition des membres de la classe chevaleresque en deux groupes, le même épisode initial de la cour plénière à Aix met cependant aussi en avant la possibilité de promotion sociale à l’intérieur de cette classe. S’adressant aux barons (v. 99), Naimes leur conseille de se fier en celui qui a le plus de valeur après Dieu, là encore pour une raison utilitaire : « Tex i vint filz de povre vavasor, / Qui au partir sera dus ou contor » (v. 103-104). Ce discours programmatique est à relier à un passage situé vers la fin de la chanson où le narrateur précise, abstraction faite des morts nombreux à l’occasion des combats, les bénéficiaires de la victoire :
Tex i vint povres et filz de vavasor,
Sers de son chief, qui franchiz fu le jor,
Que Charlemaignes mist puis an tel honor,
Au departir an fut duc ou contor.
Tant lor dona qant ce vint au retor
Que li plus povres mist puis an grant richor ;
Li oir aprés am ont encor meillor. (v. 9021-9027)
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9 Ce fait distingue très nettement Aspremont de la chans...
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10 Sur les chevaliers mercenaires, voir J. Flori, « La n...
6Par-delà ces formules générales, la chanson d’Aspremont accorde une réelle attention à ces chevaliers à la vie difficile9. Par exemple, dans le cadre des préparatifs à l’expédition en Calabre, Charlemagne demande à ses barons de lui envoyer des chevaliers exemplaires mais devenus pauvres (Les chevaliers qui sont sanz vilanie, / Qui ont vescu de lor chevalerie, / A cui avoirs et richesce est faillie, v. 782-784), à qui il fournira tout le nécessaire10. De même, dans son empressement à aider Charlemagne dans son entreprise militaire, le roi d’Angleterre Caroer fait équiper trente mille Anglais. Le narrateur ajoute une précision :
Ne soudoier ne pot il nul trover
Qui ait mestier ne d’or ne d’argent cler
Que il ne face ansenble o lui aler,
Et a chascun fist .i. destrier mener (v. 866-869)
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11 Voir dans l’éd. Suard la note des v. 871-878, p. 119.
7Arrivé à Barfleur11, Caroer fait crier que
Li chevalier qui n’ont sor coi monter,
Qui ont servi de lor armes porter,
Que molt tost viegnent au roi anglois parler,
Chevaus et armes lor fera molt doner,
Mais que il vullent ensenble o lui aler. (v. 874-878)
8Dans un tel contexte, il nous a paru utile de nous intéresser à un personnage pourtant épisodique de la chanson, un personnage au nom paradoxal, Richier, qui est un povre chevalier (v. 1464), et de suivre sa progression dans l’espace narratif.
9Charlemagne a installé son campement en deçà d’Aspremont. Il est entouré d’hommes puissants, laïques et ecclésiastiques :
12 On lit dans l’éd. Brandin : Puis fait li rois tols se...
Ansenble o lui et Naymë et Ogier,
Cil de sa table et prince et chevalier,
Et duc et conte et nobile princier,E l’apostoles et li nobles clergiers (v. 1432-1435)12.
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13 Au début de la chanson de Roland, Charlemagne demande...
10Il demande alors à ses barons (v. 1436) qui envoyer de l’autre côté de la montagne, dont le franchissement apparaît comme particulièrement périlleux (cf. v. 1441-1445). Ogier le Danois se propose, le roi refuse, sans justifier son refus. D’autres personnages importants (duc et conte et princier v. 1458) se proposent à leur tour en vain, dans cette scène de réécriture de la chanson de Roland13, ce qui apparaît plus clairement dans l’édition de L. Brandin où, après Ogier, trois barons se proposent, dans trois laisses parallèles aux vers d’intonation formés sur le même modèle :
En piés se drece li senescals Fagon,
Dus de Toscaine et fu cozins Carlon,
Qui en bataille porte son confanon. (v. 1730-1732, laisse 101, éd. Brandin)
En piés se drece dans Joifrois de Paris,
Grise Gonele, un dus de molt grant pris. (v. 1744-1745, laisse 102, éd. Brandin)
En piés se drece li bons dus Aubuïn,
Dus de Bialvais et tint le Biavoisin. (v. 1757-1758, laisse 103, éd. Brandin)
11Contrairement à ce qui se passe dans la chanson de Roland, où Charlemagne veut que soit choisi un barun de [sa] marche (v. 275), l’empereur veut dans Aspremont que soit désigné un povre chevalier (v. 1464) :
Je ne voil mie as paiens anvoier
Haut home nul qui terre ait a baillier,
Que ne l’ocient li cuvert losengier.
Donc n’avons nos .i. povre chevalier
Qui de son cors feïst tant a prissier,
Qui auques vaille se il an a mestier ? (v. 1461-1466)
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14 F. Suard remarque en outre que la « désignation [de G...
12Dans la chanson de Roland, si l’ambassade dans le camp du roi sarrasin Marsile est vue comme si périlleuse, c’est qu’elle a un précédent : Marsile a déjà tué deux émissaires de Charlemagne, les comtes Basan et Basile (v. 207-209). On comprend ainsi que, dans Aspremont, l’empereur choisisse plutôt d’envoyer chez Agolant un chevalier vaillant, mais dont la perte possible serait sans importance14.
13C’est le moment rêvé pour un nouveau personnage de faire son apparition :
Lors se dreça li bons vasax Richier ;
Cil estoit niés au bon duc Berengier ;
Ce dist la geste, n’estoit pas de moillier ;
Adoubé l’ot dus Naymes de Baivier,
Norri l’avoit desqu’il iert escuier. (v. 1467-1471)
14Membre d’un lignage puissant (c’est le niés d’un duc, v. 1468)15, vaillant guerrier (bons vasax, v. 1467), formé puis fait chevalier par le duc Naimes, Richier est cependant bâtard (n’estoit pas de moillier, v. 1469), un bâtard noble « au destin compromis »16 : privé de toute possibilité d’héritage, c’est effectivement un povre chevalier. Il se présente lui-même ainsi :
Sire ampereres, je suis .i. chevalier,
N’ai oir ne fil ne terre a justissier ;
Se povres hons i volez anvoier,
Je am serai s’il vos plaist mesagier,
A mon pooir vos voldrai bien aidier. » (v. 1473-1477)
15La réponse de Charlemagne montre combien un service réussi peut améliorer la situation matérielle d’un homme et des siens, grâce à une rétribution substantielle :
17 L’emploi du nom Amis en apostrophe au v. 1478 paraît ...
– Amis, dist Charles, bien fait a otroier.
Se sainz et sauz en poez repairier,
Ce sachiez vos, ge vos quit si paier,
Toz vos linages i avra recovrier. » (v.1478-1481) 17
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18 Cf. éd. Brandin : « Se or l’ocïent cil paien mescreü,...
16Naimes aussitôt reproche à Charlemagne sa décision, ne voulant pas perdre le bénéfice de la formation qu’il a donnée à Richier au cas où celui-ci mourrait18 (v. 1482-1483 et 1487-1488). Devant le refus de l’empereur, il avance un autre argument, celui de la jeunesse, et donc de l’absence de mesure :
Sire, dist Naymes, entendez ma raison.
Richiers est jeunes, si ne set o ne non ;
Tost i movra ou folie ou tençon,
Il i covient et mesure et raison. » (v. 1491-1494).
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19 Sont dits explicitement jeunes, dans la première part...
17On voit ainsi Richier s’intégrer également à la catégorie des jeunes, catégorie non négligeable dans Aspremont, et qui ne se limite pas à Roland et ses compagnons19. On peut voir encore dans ce passage une réécriture de la chanson de Roland, car les remarques de Naimes à propos du comportement prévisible de Richier rappellent les propos d’Olivier lorsque Roland se propose de se rendre chez Marsile :
Nu ferez certes, dist li quens Oliver,
Voste curages est mult pesmes e fiers ;
Jo me crendreie que vos vos meslisez.
Se li reis voelt, jo i puis aler ben. (Roland, v. 255-258)
18Pourtant, Charles reste insensible aux arguments de Naimes, et Richier est choisi comme messager. Durant sa tentative de franchissement d’Aspremont, Richier est présenté de façon positive par le narrateur, désireux d’atténuer son échec : voyant les torrents et les précipices, Richier s’y jette, qu’il ot cuer de felon (« car il avait un cœur impétueux », v. 1503) ; le narrateur l’appelle li bers (1507), li gentis hom (1522), [le] baron (v. 1530) ; c’est Dieu qui lui permet de sortir du torrent sain et sauf (v. 1508-1509) ; stupéfié par sa rencontre avec le griffon, Richier ne renonce pas et poursuit sa route (v. 1520-1521), jusqu’au moment où il doit abandonner et faire demi-tour (v. 1522-1527).
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20 A. Corbellari, art. cit., p. 467.
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21 Sur Naimes, voir F. Suard, « La conception du pouvoir...
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22 Sur cette ascension, voir F. Suard, « Aspremont, v. 1...
19À quoi donc sert cet épisode, qui se solde par un échec ? A quoi sert ce personnage, qui ne parvient pas à accomplir sa mission ? On peut considérer qu’est ici mise en œuvre une technique de composition qui consiste à présenter d’abord un personnage qui échoue avant d’en proposer un autre qui réussit, technique dont l’ambassade de Balant à Aix fournit un premier exemple : l’abbé Fromer est incapable de lire la lettre remise par le messager, et c’est Turpin qui la lit. « Ainsi se trouve introduit le motif de l’épreuve qualifiante vs éliminatoire, dont le prototype est peut-être à chercher dans la double quête de Calogrenant et d’Yvain dans Le Chevalier au lion et dont Aspremont nous montrera d’autres exemples, en particulier dans l’épisode de l’escalade du « tertre [perillos » (v. 1786)] qui donne son titre à la chanson : Richier échoue face au griffon que Naimes, quant à lui, parviendra à vaincre20 ». Sera ainsi grandement valorisé, par contraste, le personnage de Naimes, dont la chanson a fait l’éloge dès le prologue21. Cette technique de composition met également l’accent sur l’ascension périlleuse mais aussi pittoresque d’Aspremont22, évoquée en peu de vers à l’intérieur d’une même laisse à propos de Richier (l. 95, v. 1501-1527), abondamment développée et enrichie lorsqu’il s’agit de Naimes.
20Il faut par ailleurs remarquer que, contrairement à l’abbé Fromer, Richier ne disparaît pas du récit après son échec. Dans un premier temps, la valeur de Richier, d’abord niée, est ensuite reconnue. Ainsi, à son retour d’Aspremont, lorsqu’il raconte à Naimes cele destructïon (v. 1529), ce dernier insulte celui qu’il appelle mauvais garçon (v. 1531) alors que le narrateur vient de le désigner par le terme de baron (v. 1530) ; Naimes accuse Richier de mensonge (v. 1531) et regrette d’avoir veillé à sa formation (v. 1533-1534). Plus tard, cependant, quand Naimes entreprend lui-même de franchir Aspremont, il découvre l’éperon que Richier avait perdu pendant son ascension et se repent alors d’avoir blâmé celui qu’il considère désormais comme un baron (v. 1613). Bien plus, au retour de sa mission, dans l’édition Brandin en tout cas, Naimes disculpe Richier auprès de Charlemagne lorsque ce dernier lui demande s’il est sains et entier (v. 2769, éd. Brandin) :
— O je voir, sire, ainc n’i oi encombrier
Fors solement en Aspremont puier.
A molt grant tort en ot blasme Richier ;
Son esporon trovai el sablonier
Et s’i trovai les os de son destrier. (v. 2770-2774, éd. Brandin)
21Curieusement l’échec de Richier est ainsi en quelque sorte annulé dans la mesure où la preuve a été apportée qu’il n’avait pas menti et qu’il avait fait preuve d’un grand courage.
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23 Voir les v. 2433-2434, 2437-2440, 2445-2449, 2452-2455.
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24 Après ce vers, il est précisé dans l’éd. Brandin que ...
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25 Voir les v. 2596, 2609-2612, 2619-2627, 2640-2647.
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26 Voir dans l’éd. Suard la laisse qui occupe le bas de ...
22Dans un deuxième temps, lors des premiers combats contre les Sarrasins, on découvre Richier à la tête, avec d’autres, du quatrième corps de bataille (v. 2553), responsabilité qui n’échoit en principe qu’à des hommes de premier plan23, et Richier, le bon vasaul Richier (v. 2570)24, accomplit un coup d’éclat en tuant Hector, le porte-enseigne d’Eaumont (v. 2570-2581), ce qui provoque la déroute des païens et la fuite éperdue d’Eaumont vers sa tour, poursuivi courageusement par Richier qui cependant ne parvient qu’à frapper de son épieu le cheval de son adversaire25. Richier sera ensuite récompensé de ces deux exploits. En effet, lors du partage des idoles païennes, absent de l’édition Suard mais présent dans l’édition Brandin et dans le ms. F26, partage où des morceaux des statues sont donnés exclusivement à des barons, Richier reçoit une tête pour ce qu’il a accompli :
A ses barons done Karles l’or mier.
Un braç en done Droon le Berruier,
Roi Salemon le costé senestrier
Et Anquetin le cuisse o le braier,
Le destre espaule en dona Berengier,
La teste en ot li bons vasax Richier
Pour l’orieflanbe qu’il lor fist trebucier
Et por Eaumon qu’il ossa encauchier. (v. 3451-3458, éd. Brandin)
23Si Richier est récompensé pour une raison précise, il n’en demeure pas moins qu’il est associé à des barons.
24Plus tard, quand l’avant-garde de Charlemagne prend les troupes de Girard pour des armées sarrasines et décide d’envoyer un messager à l’empereur pour lui demander son secours, Salomon demande à Richier d’accomplir cette mission :
— Car i alez, dist Salemons, Richier;
Vos estes preuz et mout bons chevaliers,
Je ne sais home mialz nos an puist aidier. (v. 3258-3260)
25Mais Richier, qui au début de la chanson s’était proposé, refuse ici avec énergie : certes, il est un povres chevaliers (v. 3267), mais il est surtout un valeureux guerrier qui ne veut pas se montrer couard, et il a bien l’intention de faire du butin sur les ennemis, butin qu’il partagera avec ses amis :
26Richiers respont : « Serai je donc lanier,
Que l’en me doie an mesage anvoier ?
Por ce se suis .i. povres chevaliers,
Que je n’ai pas granz terres a baillier,
Si sui je ancores et corageus et fier,
S’ai bone hante et bon corant destrier,
Si i voldrai aus paiens gaaignier.
Se je per l’ame por le cors espargnier,
Dont me puis je mauvessement prissier.
O les païens me voudrai acointier,
Ou je voldrai assez or gaagnier
Dom mi ami seront tuit parçonier. » (v. 3265-3276)
27Tous les comtes approuvent alors sa réaction :
Dient li conte : « Cist est bon chevalier,
Ne [se] vialt pas por paiens esmaier. » (v. 3277-3278)
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27 Nous empruntons l’expression à Ph. Haugeard, op. cit....
28Cette scène laisse penser que, d’une certaine manière, Richier a changé de statut : s’il reste un pauvre chevalier, il n’est plus isolé, il a désormais des amis avec qui il veut partager son futur butin (v. 3276) ; autrement dit, Richier se soumet ici à l’« obligation sociale »27 de la largesse. La suite de la scène paraît confirmer ce changement, puisqu’après Richier, dans trois laisses parallèles (laisses 196-198), trois barons sollicités par Salomon refusent avec hauteur d’aller chercher le secours de Charles, ne voulant pas eux non plus être taxés de couardise. Richier est ainsi associé à ces barons, alors qu’au début de la chanson, à propos de l’ambassade chez Agolant, il était dissocié des barons qui s’étaient proposés.
29Une confirmation supplémentaire se rencontre un peu plus loin, lorsque Charlemagne fait organiser ses troupes en sept corps de bataille (laisses 218-223) : à la tête de la troisième eschiele se trouvent dus Naymes de Baivier (v. 3620), le bon danois Ogier (v. 3621), et le bon vassal Richier (v. 3620), qui est donc mis sur le même plan que des personnages de haut rang.
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28 À la l. 286 de l’éd. Brandin, qui correspond à la l. ...
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29 Le nom de Richiers le Normant apparaît encore v. 9530.
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30 Dans la première partie de la chanson, l’appellatif d...
30Le nom de Richier apparaît encore plus tard, lorsqu’il est dit d’Eaumont que De la mesnie dant Richier le Normant / Nos a ocis Huon et Elinant (v. 4801-4802)28 : il semble qu’il s’agit du même personnage, qui était appelé li bons Normans Richiez au v. 259629. Si c’est le cas, on voit que Richier, appelé dant30, a désormais une mesnie, qui rappelle les amis avec qui il comptait partager son butin (v. 3276). C’est la dernière apparition de ce personnage dans la première partie de la chanson.
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31 Voir les v. 8691, 8765, 8778, 8915, 9432, 9443, 9530,...
31Dans la seconde partie de la chanson, Richier li preuz (v. 7332) réapparaît avec d’autres (le roi Desier de Pavie, le duc Naimes, et un converti, Jérémie, dont c’est la seule apparition) à la tête d’un corps de bataille. Plus loin, avec un certain Bernard, il est envoyé chercher la tête et le bras d’Eaumont mort (v. 7543), et les deux hommes sont désignés par le groupe nominal Li dui baron (v. 7547). Dans la bataille contre les armées d’Agolant, Richier participe activement aux combats, en association récurrente avec des hommes puissants (Huon, Ogier, Samson, Naimes, Salomon) et de jeunes chevaliers (Roland et ses compagnons Graëlent, Estout de Langres, Morant)31. Il partage aussi les revers de guerriers de haut rang : il est capturé avec Salomon tandis qu’Ogier et Naimes sont désarçonnés (v. 9857-9858).
32Plus tard, Richier fait l’objet d’une présentation soignée, au moment où il est attaqué par le roi sarrasin Ulien :
En son escu ala ferir Richier
Neveu Antelme, fils fu au duc Renier,
Né de la fille au baron Berengier,
Dont Karlemaines dut faire mesagier.
Li rois l’amoit forment et tenoit chier ;
En tote l’ost n’ot mellor chevalier,
Ne meus seüst un mesage noncier
Ne Sarrasins ocire et detrencier. (v. 10049-10056)
33On voit ici que l’échec initial de Richier est totalement oublié, et que ses qualités de messager sont même louées ! Bien évidemment, Richier à son tour frappe Ulien et le tue (v. 10066).
34Richier est encore associé à des hommes de haut rang pour veiller à l’établissement de la tente royale (v. 10163), aller au secours du duc Girard (v. 10182), et, après la mort d’Agolant, retourner au camp pour prendre du repos (v. 10306). Il apparaît une dernière fois au v. 10415 : la guerre est finie, mais Charlemagne est en proie au chagrin car beaucoup de guerriers sont morts. Il n’y a personne qui soit suffisamment valide pour le servir à son repas ce soir-là, à l’exception de cinq personnages :
Ne mes que seul Girardet et Richier,
Estoz de Langres, Haton et Berengier (v. 10415-10416),
35Ces personnages sont, outre Richier, d’une part le plus jeune fils de Girard, d’autre part trois compagnons de Roland, mentionnés dès le début de la chanson, formés par Charlemagne (v. 947-949). Richier fait ainsi partie d’un groupe de jeunes gens, ce qui nous ramène à la scène initiale où Naimes dénonçait sa jeunesse (v. 1492), qui risquait de faire de lui un messager sans mesure. Mais il paraît désormais intégré.
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32 Art. cit., p. 188.
36On le voit, à la fin de la chanson, Richier le povre chevalier n’est pas devenu duc ou contor (voir les v. 104 et 9024). Toutefois, un nombre important d’indices permettent de penser que le statut social de ce personnage a changé. Pourtant, il était sans doute impossible, à propos d’un personnage précis, de mettre en scène une promotion sociale si extraordinaire et sans doute rarissime. Comme le note D. Barthélemy, la chanson d’Aspremont « exagère les possibilités offertes à ces sortes de classes moyennes que sont les serfs ministériaux et les vavasseurs. S’élever et s’enrichir par son seul mérite guerrier, fait de courage et de talent, cela arrive-t-il si souvent ? C’est le mot d’ordre de rois et de princes ‘chevaleresques’ pour recruter à des guerres, à des tournois, à des croisades. Mais gagne-t-on tant que cela ? Les préjugés en fait ne sont pas effacés, les barons restent maîtres du jeu en dépit de son apparente ouverture.32 » D’une certaine façon, la trajectoire de Richier dans Aspremont souligne discrètement l’impossibilité de voir advenir dans le réel ce que promettent les barons dans leurs discours, une promotion sociale spectaculaire.
Notes
1 Aspremont. Chanson de geste du XIIe siècle, éd. F. Suard, Paris, Champion Classiques, 2008. Nous utiliserons aussi, en le signalant à chaque fois, La chanson d’Aspremont. Chanson de geste du XIIe siècle, éd. L. Brandin, Paris, Champion, 2e éd. revue, 2 vol., 1923-1924.
2 A. Corbellari, « Parcours du désir et de la cruauté dans La Chanson d’Aspremont », L’épopée romane, Actes du XVe Congrès international Rencesvals, Poitiers, CESCM, 2002, t. I, p. 465-473, ici p. 466.
3 Voir les v. 4269-4280, 6799-6808, 6815-6823, 7334-7340, et voir à ce propos D. Boutet, « Chevalerie et chanson de geste au XIIe s. : essai d’une définition sociale », Revue des langues romanes, 2006, t. 110/1, p. 35-56, notamment p. 42-44, et Id., « Guerre et société au miroir de la Chanson d’Aspremont », Guerre et société, Byzance – Occident (VIIIe-XIIIe siècle), éd. D. Barthélemy et J.‑C. Cheynet, Paris, Centre de recherche d’histoire et civilisation de Byzance, Monographies 31, p. 173-183, notamment p. 179-180.
4 L’organisation sociale du monde sarrasin paraît toutefois calquée sur celle du monde chétien, comme le montre par exemple le v. 6457 : Et sont .xx.m. noble, que haut que bas.
5 Voir J. Larmat, « L’orphelin, la veuve et le pauvre dans le Couronnement de Louis », Charlemagne et l’épopée romane, Actes du VIIe Congrès international Rencesvals, Paris, Les Belles Lettres, 1978, t. I, p. 191-204.
6 À la fin de la chanson, Girart ne dira pas autre chose dans son chastoiement à Florent (v. 10983-11000, et en particulier v. 10999 : Il se larroient por vos tuit detrenchier).
7 Ains que li roi s’asist desos le pin / Ne qu’il se liet del perron marberin, / Les dras de soie, de palie alixandrin, / Les bons hanas et les coupes d’or fin, / Les bials ostoirs, maint falcon mostardin, / Çals a donés Carles, li fix Pepin, / As gentilx homes qui sont de rice lin. // Les palefrois, les cevals, les deniers, / Cels done Carles as povres chevaliers ; / Le vair, le gris et les corans destriers, / Les falconcials, les müés esperviers, / Ces done Carles as bacelers legiers ; / As damoisials, as vallans soldoiers, / As gentilx homes les falcons monteniers. (éd. Brandin, laisses 6-7, v. 126-139). A. de Mandach a lui aussi commenté ce passage, à partir du ms. L3 qu’il considère comme porteur d’une version plus ancienne que celle du ms. utilisé par L. Brandin, et distingue pour sa part trois catégories, celle des « gentilhommes de haut lignage », celle « des pauvres chevaliers », celle « des légers bacheliers et des damoiseaux » (« Observations littéraires et sociologiques relatives à la Chanson d’Aspremont », Travaux de linguistique et de littérature, XVI/1, 1978, p. 363-379, ici p. 373-375).
8 Ph. Haugeard, Ruses médiévales de la générosité. Donner, dépenser, dominer dans la littérature épique et romanesque des XIIe et XIIIe siècles, Paris, Champion, 2013, p. 237-238. Voir aussi Id., « L’enchantement du don. Une approche anthropologique de la largesse royale dans la littérature médiévale (XIIe-XIIIe siècles) », Cahiers de Civilisation Médiévale, n° 195, juillet-décembre 2006, p. 295-312.
9 Ce fait distingue très nettement Aspremont de la chanson de Roland, caractérisée par l’exclusivisme de la haute noblesse (voir K.‑H. Bender, « Un aspect de la stylisation épique : l’exclusivisme de la haute noblesse dans les chansons de geste du XIIe siècle », Actes du IVe Congrès international Rencesvals, Heidelberg, 1969, p. 95-105. Dans Roland, Blancandrin explique qu’avec les richesses que lui offrira Marsile, Charlemagne pourra facilement rétribuer ceux qui se battent pour lui en échange d’un salaire (« Ben en purrat lüer ses soldeiers » v. 34, « Tant i avra de besanz esmerez / Dunt bien purrez voz soldeiers lüer » v. 132-133), mais les soldeiers en question n’apparaissent nullement dans le récit.
10 Sur les chevaliers mercenaires, voir J. Flori, « La notion de Chevalerie dans les Chansons de geste du XIIe siècle. Étude historique de vocabulaire », Le Moyen Âge, n° 81, 1975/1, p. 211-244 et 1975/3‑4, p. 407-445, ici p. 243.
11 Voir dans l’éd. Suard la note des v. 871-878, p. 119.
12 On lit dans l’éd. Brandin : Puis fait li rois tols ses barons mander, / Vienent i comte et duc et prince et per / Et l’apostoles i vint alsi parler (v. 1698-1700).
13 Au début de la chanson de Roland, Charlemagne demande à ses barons qui envoyer à Saragosse, et refuse successivement Naimes (laisse 17), Roland, Olivier et les autres pairs (laisse 18), Turpin (laisse 19) ; « il oriente alors le conseil vers ‘un baron de (s)a marche’, dont la perte serait sans doute moins grave à ses yeux » (D. Boutet, Charlemagne et Arthur ou le roi imaginaire, Paris, Champion, 1992, p. 523).
14 F. Suard remarque en outre que la « désignation [de Ganelon] est cause du drame de Roncevaux, alors que celle de Richier n’entraîne aucune conséquence dans la marche générale de l’action » (« Aspremont, v. 1549-2333 : l’ambassade de Naimes auprès d’Agolant », Op. cit. n° 20, automne 2019, note 3).
15 Les v. 10050-10051 précisent son ascendance : Neveu Antelme, fils fu au duc Renier, / Né de la fille au baron Berengier. Par conséquent, au v. 1468, niés signifie sans doute « petit-fils ».
16 Dominique Barthélémy, « Adoubement et chevalerie dans les chansons de Roland et d’Aspremont », De Cavaleiros e Cavalarias. Por terras de Europa e Américas, dir. Lênia Márcia Mongelli, São Paulo, Humanitas, 2012, p. 179-189, ici p. 187.
17 L’emploi du nom Amis en apostrophe au v. 1478 paraît montrer que l’empereur s’adresse aimablement à celui qu’il considère comme un inférieur. Voir J. Subrenat, « Un fait de style : les interpellations dans Gaydon, Gui de Bourgogne », Actes du IVe Congrès international de la Société Rencesvals, Heidelberg, Carl Winter, 1969, p. 129-137, qui, en étudiant l’opposition ami-sire, conclut que, au XIIIe s., sire « marque une certaine déférence, vraie ou feinte, parfois un véritable respect », tandis qu’ami « est le plus souvent vide de sens et sert d’appellatif commode lorsque l’on s’adresse à un interlocuteur de rang inférieur » (ibid., p. 136) ; il semble bien que ce soit déjà le cas dans Aspremont, à en juger par le relevé que nous avons établi, dans diverses chansons de geste, des termes d’adresse employés à propos de portiers, relevé qui suggère en outre l’équivalence d’ami et de frere (Muriel Ott, « Statut des portiers épiques », Chanter de geste. L’art épique et son rayonnement. Hommage à Jean‑Claude Vallecalle, dir. M. Possamaï-Pérez et J.‑R. Valette, Paris, Champion, 2013, p. 351-365, ici p. 356). Dans la première partie d’Aspremont, qui se termine au v. 5545, le nom amis est aussi utilisé par Charlemagne pour s’adresser à Balant (v. 236), et par Turpin pour s’adresser au portier de Vienne (v. 968).
18 Cf. éd. Brandin : « Se or l’ocïent cil paien mescreü, / Jo l’ai nori, molt par en serai mu. » (v. 1798-1799).
19 Sont dits explicitement jeunes, dans la première partie de la chanson, Turpin (Haut home i ot et jenne bacheler, v. 106), Richier (Richiers est jeunes, v. 1492), Roland (Rollanz fu jeunes, molt ot le cuer legier, v. 4922), ainsi que Naimes dans l’éd. Brandin, lors de l’entrevue entre Naimes et la reine sarrasine, dans un monologue intérieur de la reine (« E ! Mahon, sire, par vostre poësté / Nos eüssciés moi et lui ajosté / En un bel lit molt bien egordiné, / Bien en valroit li deduis un regné. Ja d’Agolant ne seroit mais parlé, / Que cis est jovenes et icil est barbé, / S’a tolt le cors de viellece assanblé / Et cist l’a biel et molt bien acesmé. », v. 2635-2642). Est également caractérisée par la jeunesse, par exemple, la troupe menée par Roland au secours de Charlemagne : Tuit sont meschin et bacheler legier, / Toz li plus viauz n’avoit poil soz braier (v. 4304-4305). Dans « Problèmes littéraires soulevés par les chansons de geste : l’exemple d’Aspremont », Au carrefour des routes d’Europe : la chanson de geste, Actes du Xe Congrès international de la Société Rencesvals pour l’étude des épopées romanes (Strasbourg, 1985), t. I, Senefiance n° 20, 1987, p. 333-350, W. Calin, qui voit dans Aspremont « une méditation continue sur le Roland » (p. 344), insiste notamment sur la place chronologique choisie par Aspremont, avant les événements du Roland : « Roland jeune, Turpin jeune, Naimes jeune, Charles moins vieux — ils incarnent le summum de l’univers épique carolingien, un instant de perfection avant le déclin » (p. 345-346).
20 A. Corbellari, art. cit., p. 467.
21 Sur Naimes, voir F. Suard, « La conception du pouvoir dans Aspremont », Pouvoir, liens de parenté et structures épiques, Actes du 2e Congrès du REARE, Médiévales n° 28, Amiens, 2003, p. 182-193. Il faut noter que, lors de son ambassade incognito outre Aspremont, Naimes est une autre figure de chevalier soudoier (voir les v. 1937-1942) et même, dans l’éd. Brandin, sans doute en souvenir du Couronnement de Louis, de chevalier portier (voir les v. 2400-2406 de l’éd. Brandin), à savoir de chevalier ministériel (voir J. Flori, art. cit., p. 240-241). Ce chevalier portier est à rapprocher des autres figures de portier dans Aspremont (voir les v. 832-837, 967-979, 1143-1164). Sur les portiers épiques, voir notre article « Statut des portiers épiques », Chanter de geste. L’art épique et son rayonnement. Hommage à Jean‑Claude Vallecalle, dir. M. Possamaï-Pérez et J.‑R. Valette, Paris, Champion, 2013, p. 351-365.
22 Sur cette ascension, voir F. Suard, « Aspremont, v. 1549-2333 : l’ambassade de Naimes auprès d’Agolant », art. cit., et Id., « Aspremont : l’épique, le tragique, l’aventureux », Les Chansons de geste, Actes du XVIe Congrès international Rencesvals, dir. C. Alvar et J. Paredes, Granada, 2005, p. 615-631.
23 Voir les v. 2433-2434, 2437-2440, 2445-2449, 2452-2455.
24 Après ce vers, il est précisé dans l’éd. Brandin que Richier est celui Dont Charlemaines ot fait son mesagier (v. 3299) et qu’Il ne fu mie par mi l’estor lanier (v. 3300), tandis qu’on lit dans l’éd. Suard : Sis fu hons Charle, molt ot bon gerroiier (v. 2571).
25 Voir les v. 2596, 2609-2612, 2619-2627, 2640-2647.
26 Voir dans l’éd. Suard la laisse qui occupe le bas de la p. 692 et la première moitié de la p. 693.
27 Nous empruntons l’expression à Ph. Haugeard, op. cit., p. 25.
28 À la l. 286 de l’éd. Brandin, qui correspond à la l. 264 de l’éd. Suard, Richier est associé à Morant, et il tue Moÿsant.
29 Le nom de Richiers le Normant apparaît encore v. 9530.
30 Dans la première partie de la chanson, l’appellatif dant est aussi employé à propos de Girart (v. 925, 1298, 1325, 2812, 2966, 4329), de son neveu Claire (v. 1284, 1288), de l’abbé Fromer (v. 283, peut-être avec une nuance ironique, et v. 301), de Giraz de Clarant dont c’est la seule apparition (v. 2433), et de Charlemagne (v. 5178, peut-être avec une nuance de mépris).
31 Voir les v. 8691, 8765, 8778, 8915, 9432, 9443, 9530, 9635.
32 Art. cit., p. 188.
Pour citer cet article
Quelques mots à propos de : Muriel Ott
Muriel Ott est Professeur de Littérature française du Moyen Âge à l’Université de Strasbourg. Spécialiste de la chanson de geste, elle a déjà publié deux éditions de chansons de geste (Guibert d’Andrenas, Paris, Champion, 2004, et la Chevalerie Ogier, t. I, Enfances, Paris, Champion, 2013) ainsi que trois ouvrages collectifs en lien avec l’épopée (L’Epopée médiévale et la Bourgogne, Dijon, EUD, 2006, et, en collaboration, Le Souffle épique. L’esprit de la chanson de geste, Dijon, EUD, 2011, et Le Héros et la mort dans les traditions épiques, Paris, Karthala, 2018). Elle est actuellement présidente de la Société internationale Rencesvals pour l’étude des épopées romanes.